Après que Gaspar Noé et autres émules aient, par leurs exercices de
provocations, désensibilisé le spectateur moderne, il est difficile de
choquer qui que ce soit en montrant la profanation d'un corps féminin.
Mais hors de toute attente, on retrouve dans ce film de Bergman réalisé
en 1960 l'une des scènes de viol les plus réalistes et dérangeantes, et
ce sans qu'elle ne soit en aucune façon graphique.
Pendant le tiers du film, le spectateur regarde une famille de paysans
vaquer à leurs petites occupations, est témoin de quelques joutes
verbales sympathiques, puis se fait présenter Karin, fille unique de la
famille, que l'on envoie, en sa qualité de vierge, traverser la forêt
pour porter des chandelles à l'église. Mais évidemment, ce qui devait
n'être qu'un voyage rapide tourne au cauchemar...
Adapté d'une ballade suédoise du 13ième siècle, "The Virgin Spring"
forme, avec "The Seventh Seal" et "The Magician", une sorte de trilogie
médiévale dans le corpus bergmanien. On y retrouve les thèmes chers au
réalisateur, notamment son questionnement sur l'existence de Dieu, sur
la foi ébranlée par son silence éternel, mais aussi sur la place de la
vengeance dans le coeur de l'homme, sur la part de bien et de mal
présente en chacun.
Si le tout peut sembler banal à l'écrit, la réalisation lente et
paisible de Bergman confère au film un réalisme vraiment coup de poing,
d'autant plus qu'il explore la question sous plusieurs angles, en
prenant soin de ne pas faire de son film une banale histoire de
vengeance. Les extérieurs sont splendides et Max von Sydow livre encore
une fois une performance mémorable. Un tantinet fastidieux, mais somme toute une oeuvre géniale.
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